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Taxe foncière, la guerre fiscale qui divise la France en 2025

Les propriétaires français subissent un matraquage fiscal sans précédent, la taxe foncière. Elle flambe dans toute la France avec une progression automatique de 1,7 % en 2025, après des hausses vertigineuses ces dernières années. Cette escalade transforme la propriété en cauchemar financier pour des millions d’habitants.

Les chiffres révèlent l’ampleur du désastre. Nice détient le record des hausses avec une explosion de 19,2 % du taux communal en 2024. Saint-Étienne suit avec 15 %, Nancy avec 14,5 % et Annecy avec 14,1 %. Ces augmentations brutales s’ajoutent à la revalorisation nationale automatique qui grignote chaque année le pouvoir d’achat des propriétaires.

Le fossé béant causé par la taxe foncière entre territoires privilégiés et zones sinistrées

Paradoxalement, certaines communes offrent encore des havres fiscaux. Les territoires ruraux du Cantal, de la Creuse et de l’Aveyron affichent des taux communaux parfois inférieurs à 15 %. Ces communes préservent leurs propriétaires grâce à une gestion rigoureuse et des besoins budgétaires modérés.

En Bretagne, plusieurs communes maintiennent des taux attractifs autour de 18-20 %. Le Finistère compte parmi les départements les plus cléments, avec des municipalités qui refusent la spirale inflationniste. Même Brest a légèrement baissé son taux communal de 39,84 % à 39,44 % en 2024, malgré une hausse intercommunale compensatrice.

Dans le Sud-Ouest, certaines communes des Landes et du Gers proposent encore des conditions favorables. Ces territoires ruraux misent sur l’attractivité fiscale pour attirer de nouveaux habitants et dynamiser leur économie locale.

L’engrenage infernal des métropoles

À l’opposé, les grandes métropoles broient leurs propriétaires. Paris, Lyon, Marseille et Nice appliquent des taux combinés dépassant souvent 45 %. Cette pression fiscale s’explique par des budgets municipaux pléthoriques et des investissements pharaoniques qui pèsent sur les contribuables locaux.

Le taux moyen de taxe foncière, toutes collectivités confondues, était de 49% en 2022 selon la DGFiP. Cette moyenne masque des disparités territoriales énormes qui créent une France fiscale à plusieurs vitesses.

Les victimes silencieuses de cette hécatombe

Les personnes âgées payent le plus lourd tribut. Propriétaires de leur résidence principale depuis des décennies, elles voient leurs charges exploser alors que leurs revenus stagnent. Cette situation pousse certaines vers la vente forcée ou l’endettement pour honorer leurs obligations fiscales.

Les petits propriétaires bailleurs abandonnent massivement l’investissement locatif. Face à cette taxation confiscatoire, ils préfèrent liquider leurs biens plutôt que de subir ces prélèvements croissants. Cette fuite aggrave la crise du logement et réduit l’offre locative disponible.

La taxe foncière, un système automatique d’appauvrissement

En 2025, compte tenu de la valeur de l’IPCH constatée en novembre 2024, le coefficient de revalorisation est fixé à 1,068, soit une augmentation forfaitaire de 1,7 % de la base de calcul. Cette mécanique implacable garantit des hausses perpétuelles, indépendamment de la situation économique des propriétaires.

Les collectivités locales profitent de cette revalorisation automatique pour augmenter leurs recettes sans assumer politiquement leurs choix fiscaux. Elles reportent sur l’État la responsabilité d’un système qu’elles exploitent sans retenue.

La résistance s’organise timidement

En 2024, moins de 17% des communes ont relevé leur taux de foncier bâti. Cette statistique encourageante montre qu’une partie des élus locaux refuse l’escalade fiscale. Ces communes vertueuses préservent leurs administrés et maintiennent l’attractivité de leur territoire.

Malheureusement, cette résistance reste minoritaire. La majorité des collectivités cède à la facilité fiscale plutôt que de réformer leurs dépenses ou de chercher d’autres sources de financement.

L’urgence d’une révolution fiscale

Cette taxation excessive détruit le modèle français de la propriété. Elle transforme l’épargne immobilière en fardeau financier insoutenable et décourage l’investissement productif. Sans réforme majeure, ce système conduira à l’appauvrissement généralisé des classes moyennes et à l’abandon des territoires les moins favorisés.

La France doit repenser entièrement sa fiscalité locale avant que cette spirale ne détruise définitivement le rêve de la propriété pour des millions de familles.

Le renouvellement urbain passe par la destruction stratégique

Difficile à comprendre, le renouvellement urbain passe souvent par la destruction stratégique. Raser un bâtiment emblématique n’est jamais anodin. Et pourtant, de plus en plus de collectivités en Europe font le choix de la destruction stratégique, préférant démolir des ensembles obsolètes plutôt que de tenter leur rénovation coûteuse. C’est le cas à Loos, dans le Nord, où la Tour Kennedy, symbole d’un urbanisme d’après-guerre, a été volontairement réduite à néant le 20 juillet 2025. Ce geste, spectaculaire, révèle une transformation profonde des logiques immobilières.

Loos comme laboratoire de renouvellement urbain

La destruction de la Tour Kennedy s’inscrit dans un vaste programme de requalification du quartier des Oliveaux. Doté de 170 millions d’euros, ce plan prévoit des logements modernes, des commerces de proximité, un parc urbain, et une intégration renforcée aux axes de transport métropolitains. La ville espère ainsi redonner de la valeur à un secteur historiquement enclavé.

Pour les investisseurs, c’est une opportunité en or : foncier revalorisé, attractivité nouvelle, programmes neufs et durables, incitations fiscales… Loos rejoint le cercle des villes européennes qui transforment leurs quartiers à partir d’un effacement intelligent du passé.

Quand la démolition vaut mieux que la réhabilitation

La tour, construite en 1968, souffrait de nombreux maux : amiante, isolation inexistante, ascenseurs hors norme, charges d’entretien trop élevées. Malgré des tentatives de rénovation, elle ne répondait plus aux exigences environnementales, sociales et économiques du logement moderne. La réhabilitation aurait coûté plus cher que la reconstruction.

Les experts en immobilier le confirment : dans certains cas, démolir permet de repartir sur de meilleures bases, notamment quand le tissu urbain est dégradé ou inadapté aux nouveaux modes de vie.

Une tendance européenne qui s’accélère

De Berlin à Milan, en passant par Rotterdam et Saint-Étienne, le renouvellement urbain par la démolition devient une réalité stratégique. Les anciens blocs HLM, les zones industrielles désaffectées et les infrastructures sous-utilisées sont remplacés par des ensembles à haute performance énergétique, pensés pour la mixité et le confort.

Ce n’est pas un rejet du patrimoine — c’est une relecture. Certains bâtiments font l’objet de reconversions (lofts, espaces culturels), mais d’autres doivent céder leur place pour que les villes respirent, s’adaptent et accueillent une nouvelle génération d’habitants.

Autre exemple: démolition du quartier Hochhaus à Francfort

En mai 2025, la ville de Francfort-sur-le-Main en Allemagne a procédé à la démolition contrôlée du Hochhaus am Park, une tour de bureaux de 22 étages construite dans les années 1970. Ce bâtiment, situé à proximité du quartier financier, était devenu obsolète : consommation énergétique excessive, normes de sécurité dépassées, et absence de flexibilité pour les usages modernes.

Pourquoi détruire ?

      • Le coût de rénovation dépassait largement celui d’une reconstruction.
      • Le bâtiment ne répondait plus aux exigences environnementales de la ville.
      • Le terrain libéré permettait une densification intelligente avec des logements mixtes et des espaces verts.

Comment ça s’est passé ?

  • Une opération de foudroyage encadrée par des experts en ingénierie.
  • Évacuation du périmètre et retransmission en direct sur les chaînes locales.
  • Recyclage de plus de 85 % des matériaux, notamment le béton et l’acier.

L’avenir de Loos, un renouvellement urbain calculé

      • Le site accueillera un complexe résidentiel et commercial à haute performance énergétique.
      • Intégration dans le plan “Green Skyline 2030” de Francfort, visant à réduire l’empreinte carbone du centre-ville.
      • Le projet est soutenu par des investisseurs privés et des fonds européens pour le renouvellement urbain.

En outre, ce cas illustre parfaitement la logique de destruction stratégique : faire place nette pour mieux reconstruire, avec une vision durable et rentable.

Bijlmermeer, Amsterdam – Une renaissance par la chute

À l’aube des années 1990, le quartier de Bijlmermeer à Amsterdam n’était plus que l’ombre de sa promesse. Pensé dans les années 1960 comme une utopie moderne, avec ses tours d’habitation sur pilotis et ses espaces verts inaccessibles, le secteur est rapidement devenu synonyme de ghetto urbain, isolé du reste de la ville, gangrené par la précarité et l’insécurité.

Face à cette impasse, la municipalité d’Amsterdam prit une décision aussi radicale que audacieuse : détruire une partie du quartier pour mieux le reconstruire. Des tours entières furent réduites en gravats, non par abandon mais par stratégie. L’objectif : recréer un tissu urbain à échelle humaine, connecter Bijlmermeer aux quartiers voisins et redonner envie d’y vivre.

Le renouvellement urbain de Bijlmermeer

Cette phase de démolition, étalée sur plusieurs années, fut accompagnée d’un plan de revitalisation méticuleux. À la place des blocs uniformes poussèrent des immeubles bas, des rues animées, des commerces et des équipements publics accessibles. La végétation fut replantée, mais cette fois avec un sens de la convivialité. Les lignes de métro furent prolongées, et les réseaux de mobilité douce repensés.

Exemple cité dans toute l’Europe

Le résultat ? Un changement de perception radical. Bijlmermeer, autrefois symbole d’échec urbanistique, devint un exemple cité dans toute l’Europe. Crime en baisse, mixité sociale en hausse, qualité de vie retrouvée. Les investisseurs ne tardèrent pas à suivre : le foncier reprit de la valeur, les startups s’y installèrent, et les habitants, enfin, cessèrent de vouloir fuir leur quartier.

Voir aussi: L’Europe des mégaprojets 5 nouveaux quartiers urbains à suivre en 2025

Aujourd’hui, Bijlmermeer est le récit d’une renaissance urbaine, où le passé fut déconstruit pour ouvrir un avenir viable. Un modèle pour celles et ceux qui comprennent que parfois, la démolition n’est pas une perte… mais un acte fondateur.

Investir dans le vide, miser sur l’avenir

Pour conclure, derrière le nuage de poussière, il y a une vision. Celle d’un urbanisme durable, d’un immobilier évolutif, et d’une ville plus humaine. L’acte de détruire devient celui de préparer, anticiper, optimiser.

Enfin, pour les lecteurs d’Immobilier en Europe, l’enjeu est clair. Tout d’abord, suivre ces mutations, identifier les zones de transition, et investir non pas là où tout est figé… mais là où tout commence.

La nouvelle réforme du DPE pour les LMNP en 2025

Jusqu’ici, le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) était un simple indicateur. En 2025, il devient un véritable filtre à la location meublée. Pour les propriétaires en LMNP, c’est un tournant : louer un bien mal noté énergétiquement, c’est désormais risqué… voire interdit.

Reportage-vidéo : JD2M – Jedéclaremonmeublé la réforme du DPE pour les LMNP

 Imaginez Jeanne, propriétaire d’un studio classé G à Lyon. Elle l’exploite en meublé depuis 2018, sans souci. Mais depuis janvier 2025, ce logement est considéré comme indécent. Impossible de signer un nouveau bail. Son annonce est bloquée sur les plateformes. Et son locataire actuel peut exiger des travaux.

Ce qui change concrètement

  • Les logements classés G sont interdits à la location (sauf bail en cours).
  • Les DPE réalisés avant juillet 2021 sont obsolètes.
  • Les annonces doivent afficher l’étiquette énergétique et les dépenses théoriques.
  • Les meublés de tourisme sont aussi concernés : dès novembre 2024, ils doivent être classés E ou mieux pour être autorisés.

Et maintenant ?

Jeanne n’a pas le choix : elle doit isoler, changer les fenêtres, revoir le chauffage. Bonne nouvelle : elle peut amortir ces travaux si elle est au régime réel. Et des aides comme MaPrimeRénov’ peuvent alléger la facture.

LMNP et DPE, les bonnes cartes à jouer

En 2025, les meublés avec une étiquette F ou G sont progressivement exclus du marché locatif. Pour les LMNP, cela signifie choisir : investir dans des travaux ou revoir leur modèle.

Ce que la réforme implique pour les bailleurs

  • Obligation d’affichage du DPE sur les annonces, avec mention des coûts théoriques.
  • Interdiction progressive de louer les biens mal notés, selon un calendrier strict.
  • Perte de revenus potentielle, surtout pour les locations saisonnières ou courte durée.

Rénovation intelligente = rentabilité préservée

Isolation des murs, remplacement du chauffage, double vitrage… Ces travaux deviennent des leviers d’amortissement grâce au régime réel. En parallèle, des aides comme MaPrimeRénov’ et les Certificats d’Économie d’Énergie soutiennent l’effort financier. Mais attention : le nouveau DPE est plus exigeant. Un audit énergétique peut aider à cibler les améliorations les plus efficaces.

Voir aussi: LMNP : C’est quoi au juste ?

Le DPE n’est plus un détail technique. C’est un critère de décence, de fiscalité et de rentabilité. Pour les LMNP, anticiper ces changements, c’est protéger son investissement. Et pour Jeanne ? C’est le début d’une rénovation… et d’un nouveau souffle locatif.

Croissance immobilier 2025 : les leaders du marché révèlent leurs stratégies gagnantes

Le marché immobilier français connaît une nouvelle croissance et un tournant décisif en 2025. Les signaux de reprise se multiplient après deux années de turbulences. Les professionnels retrouvent l’optimisme tandis que les prix amorcent leur remontée dans plusieurs régions.

Une croissance confirmée par les chiffres de l’immobilier

Le volume de transactions atteint 803 000 logements anciens à fin février 2025. Ce chiffre marque une stabilisation progressive après la chute de 2023-2024. Les experts convergent vers un scénario de reprise modérée mais durable.

Les prix des appartements anciens progressent désormais dans 42% des villes de plus de 40 000 habitants. Cette hausse concerne particulièrement la province avec 53% des agglomérations concernées. L’Île-de-France reste plus prudente avec seulement 19% des villes en progression.

Paris maintient son leadership malgré les corrections

Paris conserve sa position de leader avec un prix moyen dépassant 10 000 euros le mètre carré. La capitale connaît cependant une période de transition après plusieurs années de baisse. Les analystes prévoient un retour de la croissance dès le second semestre 2025.

Lyon et Bordeaux suivent dans le classement des marchés les plus dynamiques. Ces métropoles bénéficient d’un équilibre entre offre et demande plus favorable qu’en région parisienne. Leurs prix résistent mieux aux fluctuations économiques.

Les taux d’intérêt favorisent la croissance de l’immobilier

La Banque Centrale Européenne poursuit sa politique accommodante. Les taux de crédit immobilier descendent progressivement sous la barre des 3% pour certaines durées. Cette évolution stimule la demande des primo-accédants et des investisseurs.

Les experts anticipent une stabilisation définitive des taux autour de 2,5% d’ici fin 2025. Cette perspective encourage les reports d’achat des mois précédents. Le pouvoir d’achat immobilier s’améliore mécaniquement.

Les salons professionnels dynamisent le secteur

Le MIPIM 2025 s’impose comme le rendez-vous incontournable du 11 au 14 mars à Cannes. Plus de 26 000 professionnels et 3 100 entreprises exposantes confirment la vitalité du secteur. L’événement met l’accent sur la durabilité et la transformation urbaine.

Le SIMI parisien programmé du 9 au 11 décembre 2025 complète parfaitement cette offre. Ce salon se concentre sur l’immobilier d’entreprise et les nouvelles tendances du marché français. Les Grands Prix SIMI récompensent les projets les plus innovants.

Les territoires révèlent leurs atouts

La province tire son épingle du jeu avec des croissances de prix plus homogènes. Les métropoles régionales attirent les investisseurs en quête de rendements. Lille, Nantes et Toulouse émergent comme de nouveaux pôles d’attractivité.

Ces villes offrent un rapport qualité-prix supérieur aux grandes métropoles traditionnelles. Leurs marchés locaux résistent mieux aux variations nationales. Les infrastructures de transport renforcent leur potentiel de développement.

Perspectives d’investissement prometteuses

L’immobilier résidentiel retrouve sa dynamique d’investissement. Les SCPI et fonds immobiliers collectent de nouveaux capitaux. Les investisseurs institutionnels reviennent progressivement sur le marché.

Le secteur tertiaire connaît une mutation profonde avec l’essor du télétravail. Les espaces de coworking et bureaux flexibles captent une part croissante des investissements. Cette tendance redéfinit les critères de localisation et d’aménagement.

La croissance perçue dans l’immobilier au deuxième trimestre 2025 s’appuie sur des fondamentaux solides. Les leaders du marché adaptent leurs stratégies aux nouvelles attentes. Les salons professionnels confirment l’optimisme retrouvé du secteur. Cette année marque une étape décisive vers la normalisation du marché français.

Les modèles de propriété d’usage en Europe : du co‑housing aux coopératives immobilières

En Europe, face à la flambée des prix de l’immobilier, aux crises du logement urbain et à la recherche de nouveaux modes de vie, un modèle alternatif émerge lentement mais sûrement : la propriété d’usage. Entre propriété privée classique et location traditionnelle, cette forme hybride séduit de plus en plus de citoyens désireux de concilier stabilité, solidarité et sobriété économique.

Des coopératives immobilières aux projets de co-housing, en passant par les résidences intergénérationnelles ou encore les colocations monoparentales, ces initiatives repensent les usages de l’habitat, la gouvernance et le rapport au foncier. Ce mouvement est particulièrement dynamique dans des pays comme l’Allemagne, la Belgique ou le Danemark, où l’ancrage historique de l’économie sociale favorise l’émergence de ces alternatives.

Qu’est-ce que la propriété d’usage ?

La propriété d’usage, par opposition à la propriété lucrative, consiste à séparer l’usage d’un bien de sa valeur spéculative. Dans ce modèle, les habitants n’achètent pas un bien pour le revendre à profit, mais pour l’occuper durablement, souvent via des structures collectives comme des coopératives d’habitants ou des groupements de co-housing.

Plutôt qu’un bien privatif dont on dispose librement sur le marché, le logement devient un droit d’usage pérenne et sécurisé, garanti par un cadre juridique et une gouvernance partagée. Cela réduit les logiques spéculatives, protège de la gentrification, et crée des logements durables à prix maîtrisés.

Des formes variées à travers l’Europe

1. En Allemagne : l’exemple de Tübingen

Tübingen, ville universitaire du Bade-Wurtemberg, est devenue un laboratoire du Baugruppen (groupes de construction), une forme très populaire de co-habitat. Depuis les années 2000, la municipalité vend des terrains à prix réduits à des collectifs de futurs habitants, qui conçoivent et financent ensemble leurs immeubles, tout en intégrant des objectifs sociaux ou écologiques.

La ville impose des critères : projets intergénérationnels, logements sociaux intégrés, mixité des revenus. Le succès est tel que plus de 50 % des logements neufs sont issus de ces initiatives. La gestion collective se poursuit après la construction, via des associations de copropriétaires autogérées, souvent inspirées du modèle coopératif.

2. En Belgique : les coopératives en plein essor

La Belgique francophone connaît un développement important des coopératives d’habitation, notamment à Bruxelles. Le modèle phare est “Fair Ground Brussels”, une foncière coopérative qui achète des biens pour y développer des logements abordables, hors spéculation.

Les habitants deviennent co‑coopérateurs : ils paient un droit d’usage au lieu d’un loyer, participent à la gestion et peuvent revendre leurs parts… sans réaliser de plus-value, pour maintenir le logement dans le circuit de l’habitat abordable.

Autre initiative remarquable : la colocation monoparentale, soutenue par des associations comme Habitat et Participation, qui favorise la mise en commun de logements entre parents isolés, avec un accompagnement social.

3. En France : des projets pionniers en devenir

Le modèle peine à percer en France, où l’obsession de la propriété individuelle reste forte. Toutefois, des projets comme La Maison des Babayagas à Montreuil (résidence autogérée de femmes âgées), ou la coopérative Chamarel à Vaulx-en-Velin, montrent que l’habitat participatif commence à trouver sa place.

En 2014, la loi ALUR a introduit un statut juridique spécifique pour les co-opératives d’habitants, mais celles-ci restent marginales. Le soutien institutionnel demeure timide, comparé aux efforts fournis en Allemagne ou au Danemark.

Gouvernance collective : comment ça fonctionne ?

Les projets de propriété d’usage reposent sur une gouvernance partagée. La règle est simple : une personne = une voix, quels que soient les apports financiers. L’auto-gestion repose sur la transparence, la participation aux décisions collectives, et des statuts clairs encadrant les responsabilités de chacun.

Certaines coopératives adoptent un mode de gouvernance inspiré de l’holacratie ou de la sociocratie, favorisant les décisions consensuelles et la rotation des rôles.

Cela demande un fort investissement humain et relationnel, mais crée une culture de l’habitat plus durable, et un sentiment d’appartenance que peu d’immeubles classiques peuvent revendiquer.

Aspects juridiques : une mosaïque européenne

Chaque pays européen encadre ces modèles à sa manière :

  • Allemagne : Le statut de la Genossenschaft (coopérative) est ancien et largement reconnu. Il permet aux habitants de devenir sociétaires de la structure qui détient les logements. Légalement robuste, il offre sécurité et stabilité.

  • Belgique : Le droit des sociétés coopératives est bien établi. Certaines foncières à but social bénéficient de statuts favorables et de soutiens publics.

  • France : La loi ALUR a créé un statut juridique pour les coopératives d’habitants, mais les lourdeurs administratives et fiscales freinent encore le développement du modèle.

  • Danemark : Le pays est un pionnier de la coopérative de logement (andelsboliger), qui représente près de 30 % du parc de logements à Copenhague. Le système repose sur un droit d’usage transmissible, avec une valorisation plafonnée.

Cette diversité crée des inégalités d’opportunité selon les pays, mais offre aussi un vivier d’expériences à mutualiser à l’échelle européenne.

Défis et limites

1. Financement

Monter une coopérative ou un projet participatif nécessite un apport collectif important, souvent sans garantie hypothécaire classique. Cela rend l’accès au crédit difficile. Certaines banques éthiques, comme Triodos ou La Nef, se spécialisent dans ces montages, mais restent peu nombreuses.

2. Temps et énergie

Créer un habitat partagé demande un fort engagement humain. La phase de conception peut durer plusieurs années. Des tensions peuvent apparaître en cours de route, notamment dans la répartition des responsabilités ou les choix architecturaux.

3. Manque de reconnaissance institutionnelle

Dans certains pays, l’absence de statut clair ou de fiscalité adaptée freine les porteurs de projet. Le cadre réglementaire reste pensé pour la propriété classique ou la location commerciale, non pour l’usage partagé.

Un impact réel sur le logement abordable

Malgré ces obstacles, la propriété d’usage offre une réponse concrète à la crise du logement, en particulier dans les métropoles. En sortant les logements du marché spéculatif, elle permet :

  • de maîtriser les prix sur le long terme ;

  • de garantir une mixité sociale réelle dans les centres urbains ;

  • de stabiliser les parcours résidentiels de populations fragiles.

L’exemple de Zurich, où près d’un tiers des logements sont en coopérative, démontre qu’un autre modèle d’habitat est possible à grande échelle.

Lire aussi : Comment la transition écologique influence l’immobilier en Europe

Vers un renouveau européen de l’habitat

La propriété d’usage n’est ni une utopie ni un luxe de bobos écolos. C’est une alternative crédible et réaliste à la propriété spéculative, capable de répondre aux défis sociaux, économiques et environnementaux du logement.

Pour cela, il faut :

  • un soutien institutionnel plus fort (accès au foncier, garanties bancaires, accompagnement juridique) ;

  • une mutualisation des expériences à l’échelle européenne ;

  • une valorisation de l’engagement citoyen dans la fabrique de la ville.

Les coopératives, co-housing, et autres projets d’habitat partagé incarnent une transition de fond, qui redonne au logement sa vocation première : être un espace de vie, de lien et de sécurité.